Amfreville, Connelles, La Roque, Le Val Saint-Martin, Port-mort: nombreux sont les sites d'escalade en bord de Seine dans le département de l'Eure. C'est ici que la plupart des anciens de notre club ont fait leurs premières armes, leurs premières compétitions aussi. Ces falaises étant un peu tombées dans l'oubli auprès de nos adhérents, ce qui est dommage, je profite du soixantenaire de notre association pour révéler leur histoire et vous donner envie de les (re) découvrir.
Mon histoire personnelle avec ces falaises commence en 1976 à Connelles: il s'agit là de la falaise la plus proche de la capitale (100 kms) et la section y organise plusieurs sorties par an. Je suppose que ce choix a été en partie dicté par le fait que ce sont les audacieux camarades du Red Star Club de Montreuil (FSGT) qui sont les ouvreurs les plus actifs des falaises de la Seine, de La Roque jusqu'à Etrétat. De l'audace, il en fallait, pour escalader dès 1955 ces falaises de craies plus ou moins déliquescentes, en grosses chaussures, encordé à la taille et le piton entre les dents! Et oui, l'équipement à demeure, pour que les voies soient répétées, se fera progressivement par la suite, à leur instigation, alors que les "premières" se faisaient en tête, à leurs risques et périls.Je me souviens lors de mes premières visites à Connelles avoir vu Nano ou Bocia (Bruno Pourtier et Francis Bocianowski) partir ainsi à l'assaut de quelque nouvel itinéraire.
A gauche, les broches "made in Montreuil" sur lesquelles nous avons grimpé jusqu'aux années 90: elles étaient pour beaucoup vissées dans la craie, inspirées des broches à glace "tirez-bouchon" des alpinistes des années soixante! |
Après avoir répertorié et testé toutes les possibilités d'escalade sur la craie de Vernon à Etrétat, le RSCM a décidé dans les années 60 à 64 de porter son effort sur le site de Connelles, qui paraissait " le plus commode à équiper, afin de permettre aux alpinistes d'utiliser plus rapidement un ensemble terminé". Mais le travail d'équipement avait également commencé sur les sites de La Roque et des Andelys dès 1956. Il se poursuivra alors après l'effort sur Connelles pour conduire au premier topo de ces secteurs, édité par l'imprimerie municipale de la ville de Montreuil. On peut y lire en introduction que les falaises de La Roque "se sont révélées être les plus solides et offrir une grande variété dans la qualité des itinéraires" et que "cette école n'aura pas d'équivalent dans la région, tant par l'éventail des difficultés offert que par son ampleur".
Les grimpeurs locaux du CAF de Rouen ne seront pas en reste, ils contibueront largement à la prospection et à l'équipement de voies et secteurs, puis le Comité Départemental FFME de l'Eure prendra le relais pour entretenir et ré-équiper de manière sûre des voies dont les points d'assurage étaient largement bricolés par les copains du RSCM. C'est ainsi que l'on verra s'actualiser les topos, d'abord par le CAF puis par la FFME pour le dernier en date.
Revenons à mes multiples visites de la fin des années 70: nous y venions pour le week-end, avec bivouac ou camping sauvage dans un vallon juste après la falaise de l'M (le nom est du à sa forme, avec deux hauts bastions séparés par une échancrure), ce qui nous permettait d'aller grimper à pied. Le RSCM s'était rendu propriétaire de la falaise tandis que le CAF avait acheté le site des Monolithes, à 500m de là (à moins que ce ne soit l'inverse...). Les falaises sont accrochées à mi-pente et dominent de somptueuses demeures au bord d'un bras de la Seine, sous la côte des Deux Amants. C'est là que j'ai fait mes premières compétitions d'escalade, nommées rallyes car le mot (ou le concept) était encore tabou dans notre activité. Organisé chaque année par le RSCM, le rallye de Connelles (tous niveaux) ou celui de la Roque (même date, mais pour les costauds) consistait pour une cordée à escalader le plus de voies possibles parmi une loooongue liste en un temps donné (6 ou 8 heures? Plus?). J'ai le souvenir d'avoir fait celui de Connelles avec Eric Vagné, celui de La Roque l'année suivante avec Alain Decang. Le challenge le plus relevé était chaque année remporté par deux jeunes grimpeurs rouennais qui feront ensuite carrière à Chamonix: Dominique Radigue (disparu en Himmalaya en 87) et Christophe Profit, champion des ascensions rapides et solo dans les années 80, avec qui je ferai la première en libre et en une journée de la Directissime Américaine aux Drus en 83.
Prise de guerre! |
L'escalade moderne en bord de Seine, ou comment allier plaisir de la grimpe, beauté du cadre et visite touristique...
La caractéristique première de ces falaises de craie, c'est leur blancheur, donc à proscrire dès que la température dépasse les 20 degrés, car on en prend bien 10 de plus sur la falaise. A part Connelles orienté Ouest, le reste est au Sud, il s'agit donc de sites de mi-saison, ou d'hiver quand la journée est ensoleillée. attention cependant aux brouillards qui peuvent être tenaces au-dessus du fleuve. L'autre caractéristique, ce sont les silex de toutes tailles qui constituent l'essentiel des prises: il faut un temps d'adaptation pour gagner la confiance. Par contre, il y a des voies très faciles, ce qui facilite la découverte et l'apprentissage. Les cotations peuvent surprendre, il faut y aller modestement et progressivement. Mais si vous ne prêtez pas trop attention à ça, je garantis le plaisir de grimper, surtout dans un tel cadre!
Deux navigateurs sur la mer de silex |
Au niveau touristique, la ville de Rouen est à 40 minutes à peine, avec ses nombreux musées gratuits (Beaux-Arts, Céramique, histoire de la médecine etc...). Je recommande également la visite guidée de 2h avec l'Office du tourisme,8 à 10€. Aux Andelys, Château Gaillard, la Collégiale Notre-Dame, l'église St Sauveur, le musée Nicolas Poussin. A moins d'opter pour un couplage Giverny/escalade pour les fans de Monet...
Depuis le Val Saint Martin, Les Andelys et Château-Gaillard |
Tour des falaises, en partant de la plus proche de Paris et en suivant la Seine, sachant qu'avec les méandres, il n'y a pas plus de 10 minutes de distance en plus, simplement les accès sont différents.
Port-Mort:
Petit site d'initiation, plusieurs voies de 3 et 4 de 20/25m, la plus dure en 6a. Elle se trouve près d'un barrage et d'une usine un peu bruyants. J'y suis allé une fois il y a 20 ans avec un groupe d'ados, c'était un bon site pour débutants, mais il y a mieux au niveau cadre.
Val Saint Martin:
Cet ensemble de falaises très accessibles ( 1h30 de Ste Geneviève,5minutes de marche) connait un franc succès, sans doute grâce au nombre des points d'assurage, qui en fait l'antithèse de ce qu'était sa voisine La Roque dans les années 70 à 2000. Compter donc 15 dégaines pour les voies de 25m! On trouve ici de parfaites voies d'initiation et les longues envolées en 4 et 5 dans les dalles grises à silex raviront les grimpeurs moyens. Le revers de la médaille: le week-end, il y a souvent foule et le pied de voies peut saturer. Nous y avions fait une courte visite il y a deux décennies et avions été rebutés par le pied de voie (direct dans la pente herbeuse très raide). Dorénavant, des vires ont été aménagées et en milieu de semaine des vacances d'octobre nous n'étions "que" quelques cordées. Nous avons eu plaisir à parcourir ces champs de silex aux difficultés très raisonnables, même si quelques surplombs coriaces nous ont bien pris la tête dans des cotations qui ... bon, n'en parlons pas!
Au départ de "La sanglante", secteur du Bastion au Val St Martin |
Des voies très abordables... |
La Roque:
Quatre falaises sont équipées pour l'escalade sportive au-dessus du village du même nom, mais l'accès se fait par le haut pour trois d'entre elles, depuis le village du Thuit. Une des autres falaises vient de s'ébouler entre deux maisons, c'est impressionnant: il y a un bloc de la taille d'un camion échoué en bord de route!
Les deux plus fréquentées ont un accès commun, ce sont la Microfalaise (15/20m) et la Bisexto, très classique et fréquentée car on y trouve les voies les plus faciles (3 et 4) mais aussi les plus longues et continues dans le 7ème degré. A proximité, la falaise de La Spéléo propose un pannel de voies de 5c à 8a+. C'est sur cette falaise qu'avait lieu le rallye de La Roque auquel j'avais participé. Depuis, j'y suis retourné une fois seulement, mais plusieurs fois à la Bisexto qui vaut vraiment le coup. Nous y avons même fait une sortie en car avec toutes les sections de l'ASL, initiant des néophites à l'escalade sur cette falaise. Ma mère y a parcouru la seule voie d'escalade de sa vie!
Je ne connais pas la quatrième, la falaise du Thuit, qui est un spot de 8ème degré où le ticket d'entrée est à 6c.
A La Roque, le pire... |
...côtoie le meilleur! |
Connelles:
A la sortie du village de Connelles, plus loin sur la Seine, on trouve d'abord le site des Monolithes, avec 4 secteurs de difficultés variées, y compris du 3. Il faudra y revenir plusieurs fois si l'on veut en gravir les différents itinéraires. Quoique leur nombre diminue: un éboulement de la falaise du Sphynx en 2013 a provoqué sa fermeture. 500m plus loin sur la petite route, voici la falaise de l'M. Dernière visite pour nous en 2016, la partie droite était entièrement ré-équipée, la branche gauche de l'M ne l'était pas encore mais je suppose que c'est fait maintenant. On trouve là des voies courtes en très bon rocher et de grandes envolées de 35m en 6a/6b.
Les monolithes de Connelles |
La falaise de l'M en hiver |
Amfreville-sous-les-Monts:
Encore 2 kms sur la même route et en 5 minutes d'approche on grimpe à La Seconde Jeunesse, un site qui mérite bien son nom car ré-équipé en 2021 avec ajout de plusieurs nouveautés. Escalades courtes, majoritairement dans le 5. Sur le chemin de celle-ci, on passe au pied du Capucin, petite falaise également équipée. A proximité, il y a également le site d'escalade de La Cariée, idéal en initiation, mais l'accès en était interdit en 2020 et 2021 pour risque d'éboulement. De toute manière l'accès se fait par le haut (site n°1 du topo) et il y a l'info au départ du sentier.
Quand y aller?
Je dirais d'octobre à avril, en privilégiant les belles journées d'automne ou hiver. Sans grosse circulation, il faut 1h30 pour y aller depuis Ste Geneviève, mais le matin en semaine c'est chaud, de même que les samedis matin de départ en we. Les retours sont difficiles évidemment le dimanche soir, mais également la semaine jusqu'à 20h. Je dirais que le mieux est de partir vers 10h du matin, en semaine ou samedi après le flot, et de rentrer par exemple après avoir mangé au libanais des Andelys (Les saveurs du Liban et de l'Orient, à emporter ou sur place). La semaine dernière nous sommes repartis à 18h après l'escalade, nous avons mis 2h10 pour rentrer (un jeudi).
Les grimpeurs ne sont pas seuls à s'ébattre sur cette côte! |
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