jeudi 9 octobre 2014

Une histoire de la section: 1964 - 2014

(Mon*) histoire de la section

*L’histoire d’une association n’est que la somme d’histoires individuelles, plus l’association vit longtemps et plus la multiplication des petits accrocs peut conduire à des divisions. Peut-on s’y soustraire ?


Les années 60
Noël 1963 : ouverture d’une MJC à Ste Geneviève, Jacqueline la directrice ( et tante de François Louvel, comme quoi « le monde est petit » ) et Jean son futur époux pratiquent l’escalade à l’Union sportive d’Ivry. Lui est aspirant guide c’est donc tout naturellement qu’ils lanceront une section montagne adhérente à la FSGT.
1er trimestre 64 : première sortie Bleau à Villeneuve/Auvers
Eté 64 : premier camp d’été en vallée de Chamonix. Au retour relance de l’activité grâce aux cars municipaux que nous avons tous les 15 jours. Pour le reste c’est le train, donc Chamarande, ou les Solex . . .
Les camps d’été suivants seront les «  camps caravanes », cordée de 10 derrière un guide avec corde en chanvre . . . l’insatisfaction pointe !
De 65 à 68 c’est la découverte active de la FSGT, nous sommes étudiants, Mai 68 se rapproche, les mots d’ordre d’autonomie, pratique en responsable, développement du sport populaire trouvent évidemment un écho dans notre groupe.
1968 : premier camp d’été en autonomie,  premier mur d’escalade dans la cour de la MJC  ( poteaux télégraphiques et planches pour s’entraîner à l’artif. ), première première en montagne à la Dent du chat, premier circuit à Bleau ( la bleue de J.A Martin peinte alors en orange de façon dégueulasse ! La norme des couleurs suivant la difficulté n’existait pas encore), premier stage d’initiateur d’escalade FSGT, découverte des autres sections, des dirigeants de la spécialité. Des liens se nouent et subsistent encore aujourd’hui.
Nous nous impliquons dans la vie de la FSGT au niveau départemental et national.
D’autres liens très forts nous unissent à Fernando Sanchez, réfugié espagnol antifranquiste, qui crée à la MJC la troupe de Théâtre l’Ensemble. Nous nous heurtons fréquemment à la municipalité de l’époque qui ne conçoit pas que la MJC et plus généralement la culture ne soit pas sous contrôle. Le stalinisme est encore très présent et c’est pour cette raison qu’un matin en arrivant à la MJC nous découvrons un champ de ruines. Les bulldozers municipaux sont passés par là, nous perdons une partie de notre matériel rasé avec le reste. Rien ne devait se soustraire à l’autorité de notre maire-sénateur-conseiller-général ! ( heureusement à l’époque il n’y avait ni agglo. ni région ! )
C’est la fin des années MJC et le début des années FSGT.
Les années 70
La droite est au pouvoir on rêve d’un monde meilleur . . .
Nous quittons la MJC en 71 pour rejoindre un petit club de quartier, l’ASL, n’ayant alors qu’une section foot. Forts de nos 150 adhérents nous avons l’ambition de développer un club omnisports FSGT à Ste Geneviève.
Nous nous réunissons toutes les semaines, sortons un journal ( On the Roc ), distribuons 5000 tracts par mois dans les boîtes à lettres de la ville pour nous faire connaître. Nous faisons fabriquer nos tee-shirts avec notre logo, pour les débardeurs, comme la couleur des circuits est ( presque, bleu et rouge sont inversés ) normalisée,  couleur imposée en fonction du classement.
Les années 70 ce sont les années classement, le livret d’alpiniste FSGT est sorti en 69 et si nous l’utilisons en montagne le principe du classement est repris à Bleau et en falaise. Ces pratiques peuvent faire sourire aujourd’hui mais il faut se souvenir ( je vous parle d’un temps que les moins de 40 ans ne peuvent pas connaître ) qu’à l’époque la base de la pratique est la cordée réversible, que nous n’avons pas de baudriers, que les clous sont espacés et qu’ils ne tiennent pas. Il était donc risqué de se lancer dans une voie sans être ( à peu près ) sûr de la sortir.
 Les années 70 ce sont les années compétitions, sorties inter-sections, ce sont les années formation. Nous imposons la présence de dirigeants FSGT au côté du guide FFM dans les stages d’initiateurs d’alpinisme pour défendre nos conceptions de la pratique. ( Certaines années nous verrons même refuser des candidats alors que le guide les jugeaient techniquement au niveau. )
Les années 70  ce sont les années Allevard, nous retrouvons nos « parents » Jean et Jacqueline pour participer à l’encadrement des enfants et adolescents dans le centre de vacances de la ville de Montreuil qu’ils dirigent. Expérience certainement unique en France ( et dans le monde libre ), nous équipons dans le Vercors une falaise  pour que les enfants puissent grimper en tête en toute autonomie. Ils pratiqueront de la même façon la randonnée et la spéléo. Pour s’entraîner nous construisons un « portique d’escalade » ancêtre de nos murs actuels.

Les années 70 ce sont les années ouvertures à Bleau,  imaginez la Roche aux sabots . . . vierge ! aucune trace de peinture, magnésie, même pas de lichen ! Robert la découvre en allant ramasser des champignons, aussitôt prévenus nous y allons  et en un après-midi avec Gilles nous ouvrons les 45 rochers de la piste bleue, Bada nous suit et trace les flèches. La rouge nous demandera un peu plus de temps. Ce sont aussi les années ouvertures en falaise ( Hauteroche naîtra en 77 ) ouverture dans le Vercors et participation avec Guido Magnone à la création de la « Dame du lac » première S.A.E.

Les années 70 ce sont les années « bouffe-co », les camps d’été sont de grosses machines uni-activité : l’alpinisme. Commission technique, commission intendance . . . départ pour 3 jours en montagne avec sacs de 30 kgs, la boîte de    5 /1 est la norme, les lyophilisés attendront. Là encore on en sourit aujourd’hui mais ce « collectivisme » a permis à des centaines d’adhérents de réaliser quelques milliers de courses, une fois passée la période d’initiation, en autonomie sans accident. Nous organisons, au niveau fédéral, et participons à des camps nationaux regroupant des alpinistes venus des autres sections FSGT et c’est à l’un de ces camps que j’aurai le bonheur de rencontrer Ewa . . .
Les années 80
La gauche est au pouvoir, on ne rêve plus !
Ce sont les années « sucres lents » et entraînement « scientifique » ( Yves Renoux a croisé notre route )
Premières 24 heures de Bleau en juin 80. Il s’agit de parcourir le plus de fois possible un circuit de 40 blocs en relais par équipe de 2,4 ou 6. Participation importante du club.
 Ce sont les années de la mort des systèmes,  collectif fait trop penser à collectivisme il faut inventer autre chose.
 Le mur de Berlin s’écroule, les murs d’escalade se développent. L’escalade se « libère » et si la pratique s’en trouve enrichie c’est aussi le retour de l’hypocrisie. Avant le jeu était simple, tu pars du bas t’arrives en haut( ou pas ) après . . .  tiré pas tiré, pas vu pas pris . . . c’est la fin du classement et chez nous la baisse de la pratique alpine, la baisse de l’initiation, la baisse des effectifs. Notre journal s’arrête en 82.
Pour ceux qui restent ça fonctionne malgré tout, nous vivons sur nos acquis et pouvoir d’achat aidant + voitures devenant ( presque ) fiables c’est la période des camps à l’étranger. Après un raté en Norvège en 79 il y aura les Dolomites et la Tchécoslovaquie où nous serons les premiers français à pointer le bout de nos chaussons.
Les années 60 ont été les années de la jeunesse, les années 70 celles de la maturité les années 80 sont celles du vieillissement. On commence à parler de dinos.
Les années 90
En politique ça s’en va et ça revient . . .
Ce sont les années des tentatives et de la diversification des pratiques
Suite à la chute du bénévolat, tentative pour mettre en place une structure d’initiation  ( payante ) encadrée par B.E du club, il n’y aura pas de suite.
Tentatives de murs bas dans les cités en accès libre ( dont un dans notre quartier de St Hubert et un dans le collège où je sévissais à l’époque, murs réalisés avec la collaboration de Jean-Marc Blanche, grimpeur et militant FSGT,1er architecte à créer des murs d’escalade en France dont des structures mobiles gérées par la FSGT ) la non fréquentation et le principe de précaution auront leurs peaux.
Tentative de relance pour On the Roc : il tiendra 10 ans de 93 à 2003. La crise de la presse commence.
Tentative pour obtenir un mur dans un gymnase de la ville, elle sera couronnée de succès en 98 et conduira à l’arrivée des premiers lémuriens et à la mutation des années 2000.
Tentative d’introduire la randonnée comme l’une des pratiques courantes de la section, un calendrier des randonnées à Bleau paraîtra même dans On the Roc . . . sans suite
Les camps d’été ré attirent du monde, les pratiques se diversifient, la randonnée trouve sa place, l’alpinisme perd la sienne. Le pouvoir d’achat aidant de mieux en mieux toujours des camps à l’étranger, évidemment Dolomites et pour certains les Etats-Unis.
Les années 2000
Les années Sarko, on boit pour oublier !
Ce sont les années Apéro, moment le plus convivial et par là-même collectif de notre pratique. Osmose réussie entre dinos et lémuriens.
Les lémuriens sont sortis et prennent part aux activités de plein-air ( il était temps, ils étaient tout pâles les pauvres ! )
Nous sommes désormais très nombreux aux camps d’été, parfois plus de 100, trois générations s’y côtoient. Les campings des années 70 avec chiottes dans les bois, douches sous les cascades, bains dans les torrents . . . ont laissé la place aux 3*** avec piscine : troisième génération oblige. Une étoile par génération ?
Les courses en montagne s’espacent au même rythme que les clous se rapprochent. Il devient difficile d’organiser des camps dans des sites faisant craindre l’aventure. Nous avons dilapidé notre capital alpin.
Les activités se diversifient, escalade, rando, via ferrata, vélo, golf . . . et malgré tout un frémissement alpin pour quelques-uns ( 2 ) qui essayent de profiter de l’expérience dinosaurienne  ( transmission orale du capital, le dino ne bouge plus beaucoup ! )  mais n’en font qu’à leur tête ce qui les mène tout penauds à l’apéro suivant. L’activité s’organise sur la base des bouffes co, petits groupes pouvant aller jusqu’à une dizaine de personnes. On ( je ? ) peut regretter que ces groupes soient cloisonnés et qu’il n’y ait que peu d’échanges sur le plan sportif. Surtout dommage pour les sans-amis : tu manges tout seul, tu grimpes tout seul ! Heureusement y’a l’apéro !
Les pratiques en falaise ont également changé, toujours le pouvoir d’achat, désormais à la Toussaint ce n’est plus Saffres, c’est Kalymnos, la Sicile, la Sardaigne . . . mais il paraîtrait, pour Kalymnos, que ce ne soit pas une activité du club donc pas ouverte à tous. Pourtant c’est le matos du club ( que je subventionne ) qui sert. Encore dommage pour les sans-amis. De quoi me faire hésiter à reprendre une licence. ( réaction épidermique pour épiphénomène . . . ) Heureusement y’a l’apéro !
A Bleau aussi les pratiques changent et pas seulement au sein de la section, les massifs expos sont délaissés, les circuits sont de moins en moins parcourus dans leur intégralité ce qui fait qu’ils se détériorent plus vite que Pépito ne les restaure. Est-ce parce que les chaussons modernes font mal aux pieds que les circuits ne sont plus suivis ou est-ce parce que les circuits ne sont plus suivis que l’on fabrique des chaussons insupportables ? L’éternelle question, l’œuf ou la poule . . . à moins que mes pieds . . . Heureusement y’a l’apéro !
Le mur d’escalade a l’air de bien se porter, l’initiation fonctionne, une section enfants a vu le jour, le lien avec la FSGT n’est pas rompu. Les lémuriens ont pris ( pour notre plus grand plaisir ) le pouvoir au bureau et s’il leur reste un long chemin à parcourir pour devenir des dinos j’ai bon espoir.
Alors ces nouvelles pratiques ? Mieux ? Moins bien ? Chacun y répondra suivant la charge émotionnelle qu’il y mettra. Pour conclure ces années 2000 laissons la parole au poète :

Non, non, non, la section n’est pas morte
Non, non, non, la section n’est pas morte
Car on grimpe encore
Car on grimpe encore . . .

Les années 2010
Les années prothèses ?









*j’avais commencé cet historique à la veille des 30 ans de la section je n’ai donc fait que le compléter à partir de faits observés par le petit trou de ma lorgnette. Et à mon âge la mémoire . . .

                                                                      Noël

3 commentaires:

  1. Magnifique ! Bravo Noël pour cette superbe histoire. Une parole du fond du cœur et des tripes... Le début de l'ère dinolémurienne à sonné ! Enfin j’espère depuis le temps.

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  2. Beau récit avec des illustrations vraiment sympas, merci Noël.
    Je tiens à ajouter une précision à propos d'une phrase au début des années 90, je cite: "Suite à la chute du bénévolat, tentative pour mettre en place une structure d’initiation ( payante ) encadrée par B.E du club, il n’y aura pas de suite."
    En fait elle a eu une suite, et l'avoir stoppée n'était pas un constat d'échec. Simplement nous avons tenté de revenir au bénévolat et le BE en question (c'était moi) a formé des initiateurs de la section dans un cadre plus large de stages d'initiateurs d'escalade fédéraux.
    Ce qui a été plus décevant, c'est le manque de retombées au sein de notre assoc, Jean-Noël se retrouvant un peu esseulé et au taquet pour assumer à lui seul de nombreuses tâches dans les années qui ont suivi (président, initiateur, responsable du mur et du matériel...)
    Tout ça pour dire que depuis les années 90, c'est un mélange de bénévolat et de salariat qui fait tourner bon nombre de gros clubs FSGT. La FSGT "escalade" fonctionne avec des salariés et l'Ile de France a recruté aussi un agent de développement il y a peu de temps. Il faut parfois s'appuyer sur les compétences d'un(e) salarié(e) motivé(e) pour dynamiser la vie associative...

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